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Les Groupements Territoriaux, Sociaux et Médico-Sociaux (GTSMS)


Encore un nouvel acronyme dans un paysage sanitaire, social et médico-social qui en dispose (déjà) tant. Les GTSMS sont issus d’un amendement gouvernemental qui introduit un article additionnel au Code de l’Action Sociale et des Familles parmi les coopérations prévues (6 articles évoquent les GTSMS dans le CASF, du L312-7-2 à L312-7-7). On peut légitimement se demander : pourquoi un énième moyen de coopérer dans un paysage hospitalier déjà riche de coopérations variées ?

La logique ayant prédominé à l’instauration des GTSMS est la faiblesse de l’offre publique médico-sociale face à des groupements privés ou à but non lucratifs de taille critique. En effet, l’offre publique se caractérise par une atomisation qui crée des situations d’isolement. Les EHPAD autonomes sont faiblement intégrés à des modes de coopération (étude de juin 2020 de la CNDEPAH sur les 1 276 EHPAD publics autonomes) :

· 217 sont en direction commune avec des Centres Hospitaliers

· 384 font partie d’une direction commune constituée d’EHPAD et 14 d’une direction commune avec d’autres types d’établissements sociaux et médico-sociaux

· Une cinquantaine d’EHPAD publics autonomes sont entrés dans le dispositif des GHT

Le législateur a donc posé le principe d’une obligation d’adhésion (I de l’article L312-4-2) soit à un GTSMS, soit à un GHT pour les EHPAD publics autonomes, les services d’aide à domicile et les accueils de jours publics autonomes. Pour les établissements rattachés à une collectivité territoriale ou à un établissement public de santé, il s’agit d’une simple faculté d’adhérer à un GTSMS. Il en est de même pour les établissements du champ du handicap.

On peut ainsi dire que l’adhésion à un GTSMS est systématique pour les EHPAD publics autonomes qui seront forcés d’y adhérer.

Il existe cependant quelques dérogations, sous réserve de l’accord du Directeur Général de l’ARS, comme les établissements et services “déjà issus de la plusieurs de plusieurs établissements” ou “s’ils présentent une spécificité dans l’offre départementale dans l’accompagnement des personnes âgées”. Les territoires et collectivités d’Outre-Mer sont pour l’instant exclus du dispositif.

Des GTSMS pour prévenir l’isolement des EHPAD publics autonomes, d’accord, mais pour quoi faire ?

Le 1er alinéa de l’article L312-7-4 définit la mission principale du GTSMS “élaborer une stratégie commune d’accompagnement des personnes accueillies pour assurer la cohérence du parcours des personnes âgées au sein d’un territoire, pouvant prévoir la détention ou l’exploitation par le groupement d’autorisation”.

Plus concrètement, cela va se traduire par un projet d’accompagnement partagé, un partenariat unique GTSMS – GHT, qui prévoit l’articulation de ce même projet avec celui (médical) du GHT.

Il va de soi que le GTSMS s’accompagnera d’une “recherche d’efficience” entre les fonctions supports pour les établissements parties. Le GTSMS devra assurer, pour le compte de ses membres, au moins une fonction parmi les 7 énoncées à l’article L312-7-4 (convergence des systèmes d’information/mise en place d’un dossier de l’usager, formation continue des personnels, démarche qualité et gestion des risques…). On notera qu’il s’agit d’une faculté de sélectionner les matières les plus pertinentes quand certaines fonctions sont obligatoirement mutualisées dans les GHT. Sur le plan budgétaire et comptable, grande nouveauté : à la différence du GHT, le GTSMS pourra être employeur, se constituer des fonds propres ou recourir à l’emprunt, ainsi que présenter un plan pluriannuel d’investissement.

Mais quelle forme juridique pour les GTSMS ?

C’est l’option du groupement de coopération sociale ou médico-sociale (GCSMS) qui a été retenue. C’est l’assemblée générale du GTSMS (composée de l’ensemble des établissements membres) qui proposera le candidat au poste de Directeur du GTSMS, votera son budget et l’indemnité de direction. Le Directeur du GTSMS sera ensuite nommé par le DGARS après avis du Président du Conseil Départemental et sur proposition de l’assemblée générale du groupement.

Et l’entrée en vigueur dans tout ça ?

Elle est prévue au 1er janvier 2025 avec une période transitoire de 3 ans. Des travaux sont en cours concernant l’élaboration d’un décret en Conseil d’Etat et d’une instruction aux ARS.

Le point de vue du SMPS

Les GTSMS ne reproduiront pas certains écueils des GHT (notamment les fonctions mutualisées obligatoires), sa souplesse permettra donc de préserver l’identité de chaque structure. Nous y voyons un moyen de dégager des marges de manœuvre et de gagner en expertise là où des EHPAD publics autonomes de petite capacité en auraient besoin (la qualité et la gestion des risques, la formation des professionnels, les systèmes d’information…). A notre sens, il faut que la taille des GTSMS soit critique pour commencer à penser mutualisations. Des questions restent en suspens sur le recours à l’emprunt ou à une trésorerie commune dans un contexte où chaque établissement membre conservera son autonomie juridique.

Quant à l’échelon départemental, il ne pourra que s’appliquer car la DGFIP s’est opposée au périmètre interdépartemental au motif que le ressort de la DDFIP est départemental. On regrettera un manque de souplesse à ce niveau, là où des établissements “frontaliers” auraient plutôt eu intérêt à rejoindre un GTSMS qui n’est pas celui de leur département de ressort. Le périmètre des GTSMS devrait également être suffisamment souple pour répondre aux besoins des personnes âgées sur chaque territoire.

Sur la gouvernance, on se réjouit que la nomination du Directeur du GTSMS soit faite par le DG ARS et que le Président du Conseil Départemental ne délivre qu’un simple avis. L’échec du transfert des Directeurs des établissements et services de la protection de l’enfance de la fonction publique hospitalière vers la territoriale s’est traduit par des situations nombreuses de directeurs en détresse, sans autonomie et les mains liées à des décisions politiques. Il ne fallait pas reproduire ce schéma.

Au SMPS, on se réjouit également de l’absence de lien hiérarchique du Directeur du GTSMS avec les autres directeurs des établissements membres. L’autonomie et les capacités de décision de nos collègues seront donc respectées (et, de facto, l’autonomie de leurs établissements).

Dans ce contexte de diminution dramatique du nombre de D3S en exercice, il faudra s’assurer que les Directeurs des GTSMS, qui exerceront leurs missions en plus de la gestion de leur établissement de référence, fassent l’objet d’une revalorisation substantielle ou d’une indemnité dédiée.

De plus, il ne faudrait pas que les Directeurs des GTSMS soient amenés à remplacer systématiquement les postes de direction vacants des établissements parties.

Sur le plan indiciaire et indemnitaire, rien n’est sur la table alors que le déploiement des GTSMS se profile dès 2025. Les nominations des futurs Directeurs de GTSMS nous semblent impossibles sans une réflexion préalable sur leur niveau de rémunération.

Enfin, il ne faut pas croire que les GTSMS seront un moyen d’améliorer les déficits dans un contexte où près de 90% des EHPAD publics autonomes sont déficitaires. Leur déploiement devra s’accompagner d’une véritable stratégie de redressement financier.