Le syndicat de tous les manageurs de santé
Actualités

Instance collégiale DH du 16 novembre 2023:

Quand le hasard des calendriers interroge sur les ambitions réelles pour la santé

L’instance collégiale qui s’ouvre ce jour se situe en effet en plein milieu de deux actualités habituellement éloignées mais qui sont pour une fois rapprochées autant dans le temps et dans le message qu’elles renvoient, questionnant le niveau de réponse de l’Etat pour les hôpitaux et ceux qui les dirigent.

La première c’est l’adoption sans vote le 4 novembre dernier par l’Assemblée nationale en première lecture des volets « dépenses » et « recettes » du PLFSS pour 2024.

Il nous apparaît hautement nécessaire de faire le constat d’orientations budgétaires en deçà des besoins des hôpitaux.

Comme annoncé, l’ONDAM hospitalier fixé pour 2023 et 2024 est une fois encore inférieur au niveau réel de l’inflation. La hausse généralisée des coûts pour nos établissements, et plus seulement en matière énergétique, ne sera donc pas intégralement couvertes, et l’ensemble des opérations d’investissement en cours seront fortement atteintes par l’envolée des offres réduisant considérablement les efforts structurés dans le Ségur.

Il en va de même pour les différentes mesures de revalorisations des professionnels de santé comme la nouvelle hausse du point d’indice de l’été dernier ou la prime de garantie « pouvoir d’achat », décidées sans réflexion sur les moyens pour les financer et les mettre en œuvre de façon pérenne surtout pour nos hôpitaux dans lesquels la mécanique tarifaire vient fracasser les efforts salariaux et amplifier l’impasse de gestion.

Car si en tant qu’hospitaliers nous ne pouvons que souscrire à ces mesures de rattrapage nécessaires au regard de nos difficultés de recrutement, on ne peut que déplorer leur manque d’intégration dans le budget de la Nation et, in fine, dans le budget de nos établissements qui en seront les premiers affectés.

Les Directeurs savent déjà ce que cela pourrait annoncer en termes de choix douloureux pour les organisations dont ils ont la responsabilité.

Pour éviter les déficits, il faudrait sacrifier les investissements d’aujourd’hui pour garantir tant bien que mal l’équilibre des budgets de demain, et ce au détriment du retour de l’activité et de l’attractivité.

Mais le « monde d’après » ne peut plus reposer sur des mesures violentes qui ont montré leur inefficacité par le passé et qui ne peuvent plus faire office de contrat collectif sacrificiel. Aucun acteur de la gouvernance profondément attaché au redressement du service public préféré des français ne saurait y apporter sa caution.

La grande fragilité de nombreuses filières de soins et la crise démographique que traverse tant l’hôpital que la médecine de ville constituent un contexte difficile totalement différent et pour lesquels les directeurs souhaitent pouvoir reconstruire équipes et bâtiments, refonder projets et engagements collectifs.

La mission des directeurs étant celle, à la tête des communautés hospitalières exsangues et dans le doute, de trouver l’énergie nécessaire à pouvoir tenir encore et toujours au bénéfice des populations, il faut donc espérer qu’au-delà de l’exercice budgétaire contraint par de nombreux contextes en particulier internationaux, l’ambition des pouvoirs publics reste celle de doter les secteurs hospitalier et médico-social des moyens de répondre à la demande sociétale plus forte encore lorsque le bateau Nation tangue sur ses fondamentaux.

A ce titre et dans une affirmation essentielle d’un rappel des valeurs auxquelles il croit profondément, le SMPS a manifesté sa totale désapprobation dans la tentative politique de faire disparaître le dispositif d’Aide médicale d’Etat. Nous saluons donc la démarche ministérielle qui va œuvrer à son maintien.

Nous rappelons aussi à cette occasion la nécessité de poursuivre les actions correctives de la réforme mal née du statut des praticiens étrangers et d’écarter toute vision politicienne de ce sujet alors même que ces praticiens œuvrent profondément au soutien de nombreuses filières, et sans oublier la nécessité de soutenir leur pays d’origine dans leurs sujets de développement social et sanitaire au bénéfice de leurs populations.

En parallèle du PLFSS se déroule depuis quelques jours une seconde actualité, évidemment plus discrète mais non moins importante pour nombre de collègues.

La poursuite des échanges avec notre ministère de tutelle sur le chantier de transposition du statut des administrateurs de l’Etat aux Directeurs d’Hôpital constitue en effet un moment crucial pour notre corps après plus d’une décennie sans aucune évolution statutaire significative.

Cela fait maintenant des mois que nous attendons l’esquisse des contours d’une réforme de la Haute Fonction Publique qui peine à s’affirmer pour son volet « FPH », si ce n’est que comme une simple transposition de ce qui est en vigueur pour les administrateurs de l’Etat.

Il est pourtant évident qu’un simple copier-coller de ce qui se fait à l’Etat ne suffira pas et ne respecterait pas les spécificités de nos missions. Vouloir faire rentrer au chausse pied nos exercices dans des cases préformatées et supposées utiles en l’état aux 2 autres versants en les amoindrissant est une erreur, déjà commise à de nombreuses reprises.

Les retards pris depuis les annonces de janvier 2023 augurent déjà une mise en œuvre malheureusement repoussée au premier semestre de l’année prochaine, avec une accélération annoncée pour ces prochaines semaines qui nous fait craindre un passage en force de textes inapplicables au CSFPH de fin d’année.

Nous saluons la volonté claire de la DGOS et du CNG de travailler à des améliorations concrètes de notre statut, en fidélité au haut niveau d’engagement des directeurs au quotidien. Mais nous déplorons qu’à nouveau la méthode imposée soit limitative d’un examen attentif de spécificités qui n’ont jamais été reconnues par l’Etat, notamment en l’absence d’un « Ségur des directeurs » et de priorité une nouvelle fois donnée à la FPE pour débuter ce cycle de renouvellement statutaire.

Un tel décalage n’est pas une surprise, mais il n’en demeure pas moins regrettable et aurait selon nous pu être largement anticipé.

Pour le SMPS, la réforme de la haute fonction publique est un rendez-vous que les Directeurs d’Hôpital ne peuvent imaginer manquer au risque, sinon, de mettre définitivement en péril le peu d’attractivité qu’il reste à notre corps.


Le SMPS continuera donc de porter des propositions ambitieuses visant à atteindre la reconnaissance pour les Directeurs et, in fine, pour toute la FPH, ce qui appelle une fois de plus à ce que les mesures annoncées soient synchronisées entre les différents corps de direction.

Nous attendons également de cette réforme qu’elle soit une véritable réponse à la crise structurelle que nous traversons. Au-delà de de mesures statutaires nécessaires pour nos métiers, elle doit constituer un nouveau pacte de confiance entre les Directeurs et les pouvoirs publics.

C’est pour cela que tous les sujets devront être abordés sans faire l’économie des spécificités qui caractérisent l’exercice hospitalier. Du déroulé de carrière jusqu’aux conditions d’accès aux différents grades, de la valorisation des emplois fonctionnels jusqu’à leur nombre et leur classement, de l’intégration pleine et entière des réalités l’exercice territorial jusqu’à la reconnaissance de notre engagement et de nos sujétions.

Le SMPS ne doute pas de la volonté de notre Ministère de tutelle de porter haut les attentes des Directeurs d’Hôpital. C’’est à ce titre qu’il est plus que jamais être forces de propositions pour que rien ne soit laissé au hasard dans les travaux pour lesquels nous nous réunirons jusque début 2024.

 En luttant contre un défaut d’ambition de l’Etat qui là aussi pourrait laisser ceux qui portent les réformes hautement complexes que les pouvoirs publics leur confient s’épuiser définitivement.

Ainsi, outre la proximité temporelle entre ces deux moments charnières, le PLFSS 2024 et la réforme de la haute fonction publique, nous pouvons constater qu’ils appellent chacun à leur manière à se poser la question de l’ambition portée par les pouvoirs publics pour l’hôpital et ses agents.

Nous comptons sur l’intelligence collective des parties prenantes pour mesurer les enjeux pour le système de santé. Celui-ci aura besoin des compétences et de l’engagement des Directeurs pour assurer ses missions et ne peut donc se contenter d’ambitions modestes pour parvenir à relever les défis que nous devrons affronter dans le futur.

Au titre des ambitions réelles et des réalisations concrètes, nous tenons également à apporter une fois encore notre soutien aux chantiers lancés par le CNG depuis plusieurs mois en vue de la mise en œuvre d’une véritable GPMC et d’une politique de qualité de vie au travail digne de ce nom pour les corps de Directions.

Ce sont les seules perspectives entendables pour redonner du sens et de la désirabilité pour nos métiers doivent être basées sur ces deux fondamentaux : une revalorisation dans le cadre de la transposition du statut mais également cette mise au cœur de nos travaux de nos conditions d’exercice et des moyens mis en place par le CNG pour contribuer à les améliorer.

Il faut pourtant être clair sur l’urgence de la situation : nous n’avons plus le temps pour tergiverser. Les Directeurs d’Hôpital attendent aujourd’hui des mesures fortes, nous appelons l’Etat à ne pas les décevoir, à ne plus les décevoir.