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Instance collégiale DH du 15 juin 2023 – déclaration liminaire du SMPS

L’instance collégiale des DH qui s’ouvre aujourd’hui est la dernière avant la traditionnelle « pause » estivale. Même si nous savons d’ores et déjà que cette période tant attendue par certains n’est pas réellement synonyme de « pause » pour l’univers hospitalier, elle constitue une étape qui permet de dresser un bilan à mi-parcours de cette année 2023 qui a déjà marqué les esprits par bien des aspects.

Avant toute chose nous ne pouvons que constater, une fois de plus, que si l’instance collégiale est devenue un pilier du dialogue social du fait de son fait paritaire et des règles qu’elle parvient à faire respecter en matière de nominations aux emplois fonctionnels et non-fonctionnels, la fréquence de ces sessions ne demeure pas une garantie d’un dialogue social de qualité.

La loi de Transformation de la Fonction Publique de 2019 a substitué à des échanges de qualité et approfondis des rencontres qui s’enchaînent frénétiquement où l’ersatz de dialogue social qui demeure se retrouve à travers des déclarations liminaires. Celles-ci constituent désormais des parenthèses au milieu d’un quotidien devenu pour beaucoup étouffant faute de perspectives favorables et constructives.

Nous ne cessons de déplorer ce changement de paradigme qui, au nom de la seule efficacité, ne permet plus de creuser les sujets, suivre les situations individuelles, questionner les parcours sauf à travers des rencontres ponctuelles qu’il nous faut régulièrement solliciter, tant auprès du CNG que de la DGOS. C’est regrettable à plus d’un titre, mais ça l’est surtout pour les collègues. Et pourtant de dialogue et d’échanges nous en aurions besoin au regard de la nouvelle saison qui s’annonce.

Il y a de cela quasiment un an jour pour jour, nous nous interrogions sur l’état dans lequel nous retrouverions nos établissements au sortir de l’été 2022 tant la situation s’annonçait exceptionnellement tendue. Force est de constater que douze mois plus tard, nous pourrions presque reprendre mot pour mot nos propos de l’époque tant la situation paraît similaire, si ce n’est pire.

En 2022 près de 20% des établissements avaient été contraint de limiter leur activité, or 2023 s’annonce déjà comme une année de nature à battre ce record. L’été n’a en effet même pas encore commencé que déjà des établissements de tout le territoire national limitent l’accès aux services d’urgence.

Les CHU et les CHR alertent déjà sur leurs difficultés et le spectre du filtrage de l’accès aux urgences en période nocturne refait déjà parler de lui. 2023 s’annonce donc finalement comme une répétition générale de 2022, que ce soit en termes de fermetures de lits faute de professionnels, de rappels inopinés et autres mesures dites « exceptionnelles » pour assurer tant bien que mal la permanence des soins.

Comme l’an dernier, les Directeurs se retrouvent donc face aux mêmes questionnements et, une fois encore, face au sentiment d’être désormais enfermés dans un cycle immuable et infernal d’enchaînement de crises, de tensions et de plans blancs au gré des saisons.

Au fil des mois et des modes dégradés qui n’en finissent plus, la lassitude s’installe durablement pour nombre de collègues. Les Directeurs préparent pourtant cette échéance depuis des mois sans attendre les recommandations venues du niveau national ou de nos tutelles en prenant toutes les mesures nécessaires pour supporter ce nouveau choc.

En effet, depuis l’entrée en vigueur de la « Loi Rist » le 3 avril dernier on ne peut que constater que ces mêmes tutelles appliquent une sorte de méthode Coué vis-à-vis des risques soulevés par la périodes estivales. Les quelques semaines précédant le passage de cap nous avaient pourtant offert l’espoir d’un véritable pilotage de la part des pouvoirs publics quant à l’organisation de l’offre de soins. Malheureusement les prises d’initiatives de ce type ont fait long feu et on en viendrait à proposer que cela relève désormais du droit à l’expérimentation dont bénéficient désormais les ARS de façon plus étendue. Cela ne surprendrait cependant plus personne si nous devions apprendre d’ici quelques jours que ces mêmes pouvoirs publics « tirent la sirène d’alarme » et prévoient un nouveau « plan d’actions » pour soutenir les services d’urgences et « sauver l’hôpital public ».

Le lancement très récemment de l’enquête « Urgences 2023 » par la DREES est à ce titre éclairant de l’ampleur de ce décalage. Cette nouvelle enquête, dix ans après la dernière du genre, vise à « apporter un descriptif démographique et médical des patients pris en charge et à décrire les évolutions structurelles majeures des urgences depuis 10 ans. ».

L’intention est louable car aucune politique publique ne peut décemment se bâtir sans éléments factuels clairs, étayés et mis à jour, mais nous en connaissons déjà tous ici les résultats : saturation des services, mise en danger de la santé des patients, baisse de la qualité de la prise en charge, manque de professionnels dans les périodes de plus fortes tensions et, in fine, épuisement généralisé des structures de soins. Nous payons ici le prix de plus de deux décennies de pressions financières dont l’une des premières conséquences est, d’ailleurs, de rendre des mesures historiques comme le Ségur de la Santé quasi inefficace tant les professionnels sont exsangues.

Nous ne pouvons à ce titre que soutenir certaines des dispositions de la loi VALLETOUX relative à l’accès aux soins actuellement en discussion au Parlement. La contribution de tous les établissements de santé, même privés, à la PDSES ou l’interdiction de l’intérim des professions de santé en début de carrière sont des mesures que nous attendions depuis longtemps et qui viendront soutenir nos institutions.

Toutefois, on ne peut que déplorer le manque d’avancées sur les questions relatives au financement, notamment en ce qui concerne la réforme de la T2A dont nous attendons toujours d’en voir les contours à la suite des annonces de janvier dernier. Il en va d’ailleurs de même concernant la réforme de la gouvernance et de l’émergence du fameux « tandem administratif-médecin ». L’annonce en grande pompe de la mission « Claris-Baille », les auditions de l’ensemble des parties prenantes et la remise des propositions de transformation de la gouvernance au début du printemps n’ont à ce jour abouti à rien de concret. A vrai dire, et c’est un comble, nous ne savons toujours pas quelles finalités sont attendues d’une telle réforme. Comme si celles et ceux qui ont impulsé une telle réforme se rendaient progressivement compte qu’elle n’est finalement pas la priorité pour les établissements de santé et que d’autres sujets, plus urgents, méritent sans doute d’être traités au préalable ; à l’instar de la pénurie de professionnels soignants et médicaux qui affecte l’ensemble des établissements et participe aux difficultés des semaines à venir.

Le malaise qui touche le système de santé est aujourd’hui trop généralisé pour être résolu uniquement par des mesures de ce type. Il faut aujourd’hui procéder d’urgence à un changement du logiciel, sauf à mettre en danger de façon certaine une population qui demeure malgré tout attachée au service public hospitalier. Mais ce changement de logiciel doit aussi concerner les Directeurs d’Hôpital, particulièrement exposés et atteints par la crise structurelle que nous traversons.

Il nous faut donc saluer ici, une fois n’est pas coutume, deux évènements qui montrent que la tendance peut également aller dans le bon sens pour notre corps.

D’abord que nous constatons que certaines ARS assument bien plus volontiers leur rôle en matière d’évaluation des chefs d’établissements.

Nous sommes régulièrement revenus, notamment au cours de cette instance, sur les nombreuses difficultés rencontrées par des collègues en matière d’évaluation par leur tutelle : entretiens reportés sine die, absence de préparation en amont, délais de transmission des éléments ou des supports d’évaluations de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, ou encore méconnaissance totale des fonctions exercées par l’évalué de la part de l’évaluateur, si ce n’était pas un rapport hiérarchique entre eux qui pouvait poser question.

Il semble heureusement que le message soit passé, même si nous estimons qu’il faille encore aller plus loin à travers des engagements plus forts de la part des ARS quant à leurs missions d’évaluation.

La proposition d’évolution de l’instruction relative à ce sujet avec le CNG et les Directeurs Généraux des ARS est ainsi restée pour nous au milieu du gué. En limitant l’obligation pour les DG d’ARS d’assurer un entretien annuel aux seuls DG de CHU et DG d’établissement de Groupe I, l’instruction met une fois encore de côté l’ensemble des chefs des établissements supports de GHT.

L’importance qu’a pris la logique territoriale dans l’offre de soins et dans la coordination entre les établissements impose plus que jamais une relation bilatérale plus directe entre l’ARS et les chefs d’établissement support. Ce point ne doit pas être négligé et le SMPS continuera de le porter.

L’autre sujet à saluer est bien évidemment la poursuite des travaux relatifs à la transposition de la réforme de la haute fonction publique pour les Directeurs d’Hôpital avec la DGOS.

Les multiples reports n’ont pas entamé la détermination du SMPS à faire de ces groupes de travail un moment de mise à plat de notre statut. Plus de 10 ans après le protocole d’accord de 2012 et presque deux décennies après le statut des DH datant de 2005, il apparaît plus que nécessaire de faire le bilan et d’ouvrir aujourd’hui une nouvelle page pour nos métiers.

Tout a en effet changé : la montée en puissance du territoire, évoquée plus tôt, la mise en place des directions communes, la complexification accrue de nos métiers ou encore les évolutions de la gouvernance ont profondément transformé nos fonctions. Ces groupes de travail doivent donc être le point de rendez-vous des DH avec leur métier.

Le SMPS a donc bien conscience de l’importance de ces enjeux. Bien que les pouvoirs publics confirment toujours le maintien de l’objectif d’entrée en vigueur de la réforme pour le 1er janvier 2024, nous veillerons à aborder les différents aspects de cette transposition avec la plus grande rigueur tout en demeurant constructifs et pragmatiques.

Les questions portant ainsi sur la valorisation des emplois fonctionnels, la disparition du quota d’accès à ce qui s’apparente à la hors classe ou encore le maintien de notre régime indemnitaire seront au centre des débats. Plus qu’une simple réforme, il s’agit de faire du nouveau statut qui ressortira de ces travaux un point de départ vers un métier de DH renouvelé et revalorisé.

Soulignons à ce titre un dernier point : l’absence de publication à ce jour de taux de promotion pour l’accès à la hors classe. Nous sommes depuis janvier dans l’attente de ce taux pourtant annoncé comme devant être connu rapidement afin d’engager sereinement la transposition sur le régime des administrateurs de l’État.

Au-delà de l’étonnement vis-à-vis d’un tel retard, on ne peut que déplorer le silence sur les raisons expliquant cet allongement des délais. Les collègues sont en attente de réponse et ce type de situations n’est pas de nature à les rassurer quant à la considération qui leur est accordée.

Dans la même veine, nous ne pouvons que réaffirmer la nécessité pour l’Instance collégiale de fonctionner au regard des règles dictées collectivement.

Enfin, à quelques jours du concours de Directeur d’Hôpital qui débutera la semaine prochaine, nous souhaitons comme chaque année bonne chance à toutes les candidates et tous les candidats.