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CAPN DH du 22 septembre 2022 – Déclaration liminaire du SMPS



Face à une stagnation statutaire devenue insupportable, le SMPS appelle à renouer avec un véritable dialogue social et à l’ouverture d’un Ségur des Directeurs à la hauteur des enjeux.
Il y a urgence à agir !



Déclaration liminaire du SMPS  22 septembre 2022 

Ce n’est plus une surprise désormais, l’ordre du jour de cette CAPN est, comme ses prédécesseurs, un chef d’œuvre de minimalisme, avec un ordre du jour limité par les effets de la loi de Transformation de la Fonction Publique.
 
Rappelons que son objectif à l’origine était de « promouvoir un dialogue social plus stratégique et efficace dans le respect des garanties des agents publics ». Chacun pourra en apprécier la réussite.
 
Avec deux points concernant les DH Hors classe et un seul relatif à ceux en classe exceptionnelle, la CAPN est devenue véritablement une coquille vide, symbole de cette évolution regrettable.
 
Elle ne permet en tous cas plus un suivi des parcours, une mise en perspective des dossiers statutaires et ne traite, par nature réglementaire, que de sujets visant les situations problématiques que rencontrent les collègues.
 
Cela ne doit pour autant pas être interprété comme une absence de sujets réels et sérieux concernant notre corps, au contraire. Ce n’est qu’un trompe-l’œil, car les attentes et les besoins ne manquent pas, s’accumulent et même débordent.
 
Pour nombre d’entre eux les semaines qui viennent de s’écouler se résument à une recherche ininterrompue de tous les moyens pour maintenir l’activité, quitte à recruter in extremis des soignants aux tarifs les plus prohibitifs, avec, dans certains cas, la douloureuse nécessité de devoir suspendre des urgences de nuit, stopper l’activité des blocs ou fermer une maternité.
 
Ces décisions affectent en premier lieu les patients, pour qui ces mesures sont bien souvent incompréhensibles, mais également les professionnels, qu’ils soient soignants ou manageurs. Elles viennent à chaque fois éroder un peu plus le sens de nos métiers, pourtant plus que jamais nécessaires en ces temps troublés.
 
Comment par exemple nos collègues peuvent-ils trouver du sens dans une campagne annuelle d’évaluation dont l’objet demeure l’appréciation d’objectifs « mesurables, accessibles, discutés et réalisables » alors que ceux-ci se débattent dans une situation de crise permanente ?
 
Va-t-on évaluer un DSI à sa capacité à atténuer le choc d’une cyber-attaque alors que les crédits d’investissement font défaut pour mener à bien l’entrée dans un monde 5.0 de nos établissements ? Un DRH au faible nombre de démissions de soignants dans son établissement comme autrefois au nombre de jours de grève, sans considération d’un tournant sociétal ?
 
Pour les chefs d’établissement, la première satisfaction serait d’avoir une évaluation au plus haut niveau des ARS, en reflet de leur niveau inégalé de responsabilité dans les territoires. Mais cela n’a pas lieu, en forme de relégation des directeurs à une présence subalterne en région, et comme si l’évaluation d’un dirigeant était équivalente à une remise de bon point de grande section de maternelle, sans regarder la nécessité de fixation d’un cap, et d’en mesurer la trajectoire, entre l’État et ses meilleurs serviteurs en santé.
 
Pourtant les temps que nous vivons sont inédits, d’épuisement, d’exposition et de vaine espérance : colère palpable dans les services, pénurie chronique de soignants, sentiment d’impasse dans lequel se trouve le service public hospitalier, vertige bureaucratique qui paralyse les énergies en repoussant les décisions utiles et en empêchant le progrès collectif comme dans les récentes réformes statutaires médicales qui se contredisent les unes les autres…
 
Tous ces éléments participent à la grande lassitude qui frappe aujourd’hui l’hôpital public. Et si nos établissements ont tenu, selon l’expression consacrée médiatiquement ; ce n’est que grâce aux efforts, à l’anticipation et au dévouement de leurs agents. Et à leur tête, les directeurs d’hôpital.
 
Comme trop souvent, les DH sont en première ligne, mais jamais en première page, ou alors à leur détriment. Loin de nous cependant l’idée de demander à être encore plus exposés que nous le sommes.
 
Tout ce que nous souhaitons c’est la reprise urgente d’un vrai dialogue avec les pouvoirs publics pour le bien de nos établissements et des agents que nous gérons.
 
Mais aussi pour rechercher encore et encore la reconnaissance que l’État nous retient alors que les décisions que nous prenons ou que l’on nous fait prendre sont d’un tel niveau d’engagement individuel et collectif.
 
Et le premier regret est bien de constater la stagnation statutaire dans laquelle nous demeurons depuis près d’une décennie.
 
PFR dépassée et non revalorisée, trajectoire de carrière bouchée avec un quota de passage à la hors classe et un accès au GRAF déphasé, sclérose des emplois fonctionnels, faible accès à la formation de haut niveau, passerelles limitées ou dévalorisantes.
 
C’est pourquoi le SMPS appelle aujourd’hui à ce que s’ouvre enfin un véritable « Ségur des Directeurs » à la hauteur des enjeux et des attentes, afin de reconnaître le travail des collègues à sa juste valeur et de prendre enfin les décisions qui s’imposent pour l’avenir de notre métier, le tout dans un calendrier qui nous permette d’envisager des négociations rapides.
 
Il y a en effet urgence à agir, et à agir en profondeur pour inverser la tendance.

Les données qui nous sont récemment remontées et qui font état d’une diminution dramatique du nombre des candidats au concours de DH sont pour nous le dernier signal d’alarme d’un corps à la dérive. Les potentiels candidats ne s’y trompent pas et le doute s’installe, même chez les collègues les plus motivés.
 
Il n’en va donc plus seulement de renouer avec la sempiternelle « attractivité », mais de sortir de modes de gestion dont les effets délétères apparaissent plus que jamais comme ni durables, ni souhaitables, ni soutenables.
 
La crise sanitaire nous aura ainsi appris que ceux-ci sont tout ce que le service public hospitalier ne doit plus être. Car en plus d’affecter cette fameuse attractivité qui touche à la fois nos établissements et notre corps, cette logique n’en finit plus d’altérer les conditions d’exercice de ceux qui demeurent en place et, à terme, leur engagement pour l’hôpital public.
 
Personne ne pourra décemment blâmer les collègues qui font le choix, souvent difficile, de changer de voie et de quitter le corps après des années de bons et loyaux services sans réelle amélioration de la situation ou revalorisations. Les hospitaliers font depuis des années la preuve de leur dévouement exemplaire car ils savent que leurs missions sont porteuses de sens, que ce soit celui des valeurs du service public hospitalier ou, plus généralement, celui de servir l’intérêt général. Mais une fois ce feu sacré éteint, que leur reste-t-il sinon le besoin, fort légitime, de se préserver ?
 
En cela il est aussi vital que se mette en place une véritable politique de prévention des risques psycho-sociaux ainsi que de prévention de la santé au travail chez les Manageurs de Santé, qui dépasse les traitements lacunaires proposés.
 
Il devra également avoir à son ordre du jour l’ensemble des règles encadrant notre déroulé de carrière et qui affectent directement l’investissement personnel de nos collègues, notamment les plus jeunes.
 
Nous ne comptons plus le nombre de collègues qui nous ont fait part de leur déception de ne pas être inscrit au tableau d’avancement pour l’accès à la Hors-classe cette année, et ce alors qu’ils réunissent toutes les conditions statutaires et professionnelles pour y prétendre et malgré des dossiers justifiant de leurs excellentes qualités et de leur engagement individuel.
 
Malgré la mise en place d’une ligne directrice de gestion intégrant des critères plus équitables et acquise grâce à l’action du SMPS qui a porté ce sujet jusqu’au tribunal administratif, la mise en place de ce quota demeure une copie de ce qui s’applique pour les Administrateurs de l’État. La réduction au printemps dernier de ce taux de promotion à 30% des promouvables réunissant les conditions statutaires pour prétendre à la Hors-classe est ainsi venu souligner l’aveuglement de l’État, au mépris de la diversité de nos métiers et de nos exercices. L’alignement à venir sur celui en vigueur dans la Fonction Publique de l’État ne viendra que confirmer cette tendance.
 
Le message envoyé à ces collègues qui ont traversé la crise sanitaire est désastreux : Pour eux la mise en place d’un quota aussi inique vient rompre le contrat de confiance établit avec l’État et questionne leur engagement à servir dans de telles conditions et pour une telle reconnaissance. Nous continuerons à dénoncer ces effets délétères et cette profonde injustice.
 
Il en va de même pour les conditions d’accès au GRAF, dont nous appelons depuis longtemps à ce qu’elles soient élargies pour que plus de collègues puissent y prétendre et ainsi être valorisé pour leurs expériences dans toute leur diversité, et ce même si elles sortent du champ hospitalier. Il s’agit de redonner aux collègues des perspectives d’évolution sérieuses et accessibles en dehors des « voies royales ».
 
De telles négociations ne pourront de surcroit plus faire l’impasse sur la refonte urgente du cadre des emplois fonctionnels, que ce soit sur leur nombre notoirement insuffisant et en inadéquation totale avec les besoins de nos établissements que sur les règles les régissant.
 
Ainsi de trop nombreux collègues Directeurs déplorent le manque d’accompagnement dans leur transition vers d’autres fonctions et risquent de subir le couperet de la fin de leur emploi fonctionnel alors qu’on les laisse dans l’expectative pendant des mois, voire des années, sans prémisse de solutions.
 
Leur investissement personnel pour assurer de telles fonctions ne mérite pas de les laisser dans cette insécurité professionnelle et personnelle. Ce chantier est essentiel à nos yeux pour revaloriser notre corps.
 
Ce Ségur des Directeurs devra enfin aussi prendre en compte l’ensemble des transformations majeures de nos métiers au cours de la décennie écoulée. L’émergence du territoire avec la création des GHT et la multiplication des directions communes sont venus bouleverser nos modes d’exercice en s’ajoutant aux responsabilités toujours grandissantes que nous exercions déjà. La mesure de cet exercice territorial, son rôle dans le déroulé de carrière et ses conséquences tant sur l’aspect professionnel que sur la qualité de vie au travail doivent donc mieux pris en compte et valorisés.
 
Tous ces dossiers cruciaux sont sur la table. L’épisode politique que nous avons connu au printemps dernier étant achevé et la rentrée étant bien entamée, il est désormais temps de les aborder sereinement et d’y apporter des réponses après ces années de silence.

Encore dans l’attente que la DGOS retrouve une organisation stabilisée et dans l’expectative pour l’avenir du CNG, le SMPS demande aujourd’hui de l’écoute, du dialogue, des réponses, en un mot du respect.
 

Je vous remercie.