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Instance collégiale DH du 14 septembre 2023 – Déclaration liminaire du SMPS

Mesdames et Messieurs,

Une fois de plus, l’instance collégiale de rentrée de ce jour se tient après un été de tous les records pour les établissements de santé.

Si l’enquête SAMU-Urgences de France dénombre plus de 160 fermetures de services d’urgences contraints de fermer faute de ressources humaines au cours des mois de juillet et août 2023, celle-ci ne dénombre pas le lot de tensions extrêmes, de suspensions d’activités, de fermetures de lits et autres délestages auxquels il a fallu se résoudre pour assurer, tant bien que mal, la continuité et la permanence des soins.

Ainsi la FHF estime que 40% des établissements considèrent que la situation des urgences hospitalières s’est dégradée entre 2022 et 2023, signe de la fuite en avant dans laquelle nous sommes désormais entraînés à chaque nouvel été.

Dans ce contexte général qui est désormais la nouvelle normalité à laquelle nous sommes astreints, ne manquons pas de saluer, une fois encore, l’engagement sans faille des Directeurs pour assurer dans la limite du possible le maintien de nos services publics à l’échelle du territoire.

Mais si les dernières années ont conduit les Directeurs d’Hôpital à devenir de véritables experts en anticipation et en gestion des crises à répétition, ceux-ci ne peuvent définitivement pas se résoudre à ce qu’une telle situation se pérennise et devienne l’ordinaire, voire l’acceptable.

Revenir une fois de plus sur l’essoufflement de notre système de santé reviendrait à répéter ce sur quoi l’ensemble des organisations représentatives des Directeurs alertent les pouvoirs publics depuis des années.

Pourtant cette situation ne doit pas être minimisée au regard de son impact tant sur le service rendu à la population que sur la motivation des collègues à poursuivre leurs missions dans de telles conditions.

Et si on ne peut que saluer les annonces récentes de pérennisation des revalorisations des rémunérations de nuit, des jours fériés et des astreintes des professionnels médicaux et paramédicaux, ainsi que leur extension aux agents des EHPAD, on ne peut qu’espérer leur impact réel en termes d’attractivité.

Ces mesures de rattrapage, nécessaires et attendues mais peu financées pour les établissements, ne sont, l’instar de celles du Ségur de la Santé en 2020, que des palliatifs dont les effets attendus fondent comme la neige d’un soleil de canicule.

D’autres chantiers sur la permanence des soins, la carrière des PH, des HU, des praticiens étrangers, bref de tous les médecins…sont encore sur la table.

L’absence de régulation de l’offre du secteur privé lucratif, généralement exempté de permanence de soins et bénéficiant logiquement de conditions de travail allégées reste douloureuse pour les hospitaliers.

Ce sentiment généralisé ne peut avoir que des conséquences délétères pour l’ensemble des métiers composant les hôpitaux, et a fortiori pour les Directeurs.

Rappelons une nouvelle fois qu’à l’exception du CTI les directeurs sont les seuls (à l’exception très partielle des directeurs des soins) à ne pas avoir bénéficié de revalorisation dans le cadre du Ségur.

A ce titre, en matière d’attractivité les chiffres ne mentent pas : Cette année la barre symbolique des moins de 400 présents au concours de Directeurs d’Hôpital a ainsi été franchie, et ce pour un nombre record de 113 postes ouverts. La chute du nombre de candidats aux différents concours se poursuit et avec lui l’enchaînement d’années où les nouvelles promotions ne font pas « le plein » de nouveaux entrants par rapport au nombre de postes ouverts.

La poursuite d’une telle situation fait donc courir de véritables risques pour notre corps à moyen ou long terme et pourrait l’entraîner définitivement dans un cercle vicieux où la multiplication de postes inoccupés pèsera forcément tôt ou tard sur les collègues en poste devant en assurer l’intérim, renforçant in fine la perte d’attractivité.

Déjà le nombre de postes vacants menace le fonctionnement de nombreux établissements et creuse le sillon de l’appauvrissement en compétences et mine l’enthousiasme de ceux qui restent et sont peu reconnus.

Le SMPS ne doute pas de la prise de conscience des pouvoirs publics sur cette situation.  Ainsi, parmi les multiples réponses apportées pour contrecarrer cette tendance, les négociations portant sur la transposition du statut des administrateurs de l’État au corps des Directeurs d’Hôpital figure parmi les meilleures pistes des dernières années.

Les travaux débutés au printemps avec la DGOS ont de ce fait permis de mettre en lumière le cadre et les attendus de cette future réforme d’ampleur. Celle-ci demeurent cependant encore dans un clair-obscur qui mêle la certitude d’une date de mise en œuvre, janvier 2024, à l’incertitude du contenu concret de cette transposition avec un calendrier de travail désormais invisible.

Nous attendons donc de la DGOS la poursuite du calendrier de rencontres entamé il y a quelques mois afin de donner aux organisations syndicales, et in fine à l’ensemble des collègues, une visibilité sur cette réforme attendue.

De nombreux sujets restent ainsi en suspens. Citons par exemple la question du maintien ou non d’un équivalent de GRAF, la persistance de règles d’accessibilité à la Hors classe plus restrictives pour les DH que pour leurs homologues de la FPE et de la FPT ou encore les enjeux relatifs à la valorisation des emplois fonctionnels et des postes à haute responsabilité.

La publication du tableau d’avancement à la Hors classe pour 2023 a ainsi été une nouvelle démonstration de l’injustice générée par le maintien d’un quota de passage bien trop bas. Sur les plus de 120 dossiers étudiés, trop de collègues qui ont démontré leurs compétences et leurs talents depuis leur prise de fonction devront encore attendre une, deux voire trois années supplémentaires avant d’espérer bénéficier d’un avancement de grade.

L’accroissement continu de ce « stock » de non promus va ainsi accroître année après année cette problématique à laquelle la réforme à venir devra apporter des réponses concrètes et équitables.

Mais bien que cette transposition soit l’un des enjeux majeurs des mois à venir, il convient pour le SMPS de profiter de ce moment de transformation pour mettre enfin sur la table l’ensemble des questions de fond relatives à nos métiers, à nos conditions de travail ainsi qu’aux perspectives d’évolution. Il appartient donc à l’ensemble des parties prenantes de mesurer les enjeux du moment et d’aller au-delà.

Car l’attractivité repose aussi, faut-il le rappeler, sur les perspectives de carrière offertes aux collègues qui rentrent dans la profession mais aussi à celles et ceux qui aspirent à accéder à des fonctions à hautes responsabilités.

Nous ne pouvons à ce titre que nous féliciter de l’adoption cet été de la loi du 19 juillet 2023 visant à renforcer l’accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique à laquelle le SMPS a pu contribuer par ses interventions auprès des pouvoirs publics.

La mise en place de règles de parité strictes dans l’accès aux emplois fonctionnels et aux postes de chefs d’établissement ouvrira la voie à une nouvelle génération de collègues, femmes comme hommes. C’est de ce type de mesures ambitieuses dont nous avons aujourd’hui besoin pour relever les défis de nos établissements.

Mais si préparer l’avenir de la profession vers une plus grande égalité professionnelle est une démarche louable à laquelle nous appelons de nos vœux, celle-ci ne peut désormais plus faire l’impasse sur la mise en œuvre d’une véritable GPMC à la hauteur des enjeux et d’un accompagnement accru et renforcé des collègues qui occupent d’ores et déjà ces fonctions de hautes responsabilités.

Dans la continuité des travaux annoncés par le CNG avant l’été, nous appelons donc à poursuivre les efforts déjà menés en matière de suivi des emplois fonctionnels, en particulier pour celles et ceux qui arrivent à la fin de leur détachement.

Ainsi l’approche de la date butoir des 8 ans sur emplois fonctionnels apparaît encore pour trop de collègues comme une source d’insécurité professionnelle, a fortiori pour ceux qui atteignent de façon dérogatoire les 10 ans sur leur poste.

Outre le fait que s’engager sur de tels emplois à hautes responsabilités doit être mieux accompagné, la multiplication de ces situations confirme qu’il devient urgent de revoir en profondeur les choix opérés depuis près d’une décennie sur les emplois fonctionnels, tant sur leurs modalités que sur leur nombre. Et ce afin de les mettre enfin en correspondance avec les mutations territoriales sans précédent qu’ont connu nos établissements depuis près d’une décennie.

De tels enjeux demeurent importants à l’aune de la perte grandissante d’attractivité de nos métiers que nous évoquons plus tôt mais aussi de la nécessité de mieux valoriser les acquis et les compétences développées par les collègues qui ont eu à exercer de telles fonctions. Remettre enfin la question des emplois fonctionnels au cœur des réformes en cours doit ainsi aboutir à des parcours de carrières offrant plus de visibilité et de perspectives, et ce aussi bien pour les Directeurs en CH qu’en CHU.

La période d’affectation des élèves Directeurs d’Hôpital qui se déroule actuellement est ainsi un nouvel exemple du pouvoir d’attractivité des CHU vis-à-vis de Centres hospitaliers qui peinent à attirer de futurs collègues.

Et nous serions bien mal placés pour leur reprocher au regard des perspectives et de la visibilité que peuvent offrir de façon rassurante les établissements. Ce n’est ici qu’un énième avatar de la métropolisation à l’œuvre dont nous déplorons les conséquences dans les territoires où le service public peine désormais à assurer ses missions envers la population.

Il appartient donc plus que jamais à nos tutelles de redonner à nos métiers une réelle désirabilité pour tous, c’est-à-dire autant pour les futurs collègues que pour ceux actuellement en poste et a fortiori pour celles et ceux qui se destinent à exercer des fonctions en chefferie ou sur emploi fonctionnel. Il s’agit de démontrer une fois de plus que le mérite et les compétences doivent primer et être récompensées à leur juste valeur.

Une fois encore, le SMPS défend avant tout l’expérience et les compétences dans l’évolution de carrière. Les LDG en vigueur sont à ce titre très claires et la souplesse qu’elles offrent demeure un atout sur lequel nous devons nous appuyer.

Mais cela demande encore une fois la mise en place d’un véritable accompagnement de carrière au long cours, ambitieux, capable d’embrasser tous les aspects de celles-ci, notamment en termes de santé au travail, mais également la diversité des parcours que nous offre le secteur hospitalier et qui doit demeurer notre force.

Nous savons que c’est ce à quoi aspire la gouvernance actuelle du CNG et nous soutenons pleinement cette démarche. Elle vise à répondre aux attentes de collègues attachés au service public hospitalier mais qui peinent encore à voir à quoi peut ressembler une telle GPMC.

Les travaux auxquelles nous seront amenés à participer dès aujourd’hui en sont la preuve. Là aussi, fidèle à ses habitudes, le SMPS veillera à être force de propositions dans l’intérêt de tous les Directeurs.

Ces quelques exemples constituent un rappel nécessaire que la réforme de la haute fonction publique et son volet hospitalier ne peut donc se limiter à des questions indiciaires et indemnitaires mais doit bel et bien conserver l’ambition d’aller au-delà.

Nous faisons ces vœux pour le futur de notre corps. Comme vous le savez, les candidats aux concours votent déjà avec leurs pieds. Il nous appartient à tous, collectivement, de leur donner envie désormais de revenir sur leurs pas.